mardi 19 février 2008

LE COOL JAZZ OU WEST COAST JAZZ

Je suis en train d'écouter cet album de Miles davis: "Birth of the cool" mais j'écoute aussi celui de Gerry Mulligan (1992) "The rebirth of the cool" qui est un remake qui malheureusement n'a pas pu réunir tous les musiciens, du fait de la mort de Miles Davis en 91. Il fut donc remplacé par Wallace Roney.

Le Cool Jazz n'est pas à proprement parler un "style", c'est en fait un courant de jazz datant des années 50 (bien qu'on en trouve déjà des prémisces dans les années 20 et 30 chez des musiciens tels que Lester Young et Bix beiderbecke). A cette époque, le Be Bop est le style pratiqué par la plupart des musiciens de Jazz.
Le Cool Jazz se caractérise en fait par une interprétation plus détendue, un son plus doux et sensuel, un phrasé peu accentué et très peu de vibrato. Les lignes mélodiques sont plus lentes, et harmonieuses, les arrangements très raffinés. C'est aussi un Jazz "de chambre". Les formations n'excèdent pas une dizaine de musiciens. Lester Young est l'idole des musiciens de Cool. Le répertoire est varié, il peut emprunter au swing de Count basie, aussi bien qu'aux pièces de Davis ou au néoclassicisme des orchestres blancs.
Il a été dit que ce mouvement reflétait l'ambiance d'après guerre, plutôt pessimiste, intellectuelle et ne sortant pas trop d'une certaine réserve sur le plan émotionnel. Il rencontrera le succès bien plus tard.

L'initiateur du mouvement est Miles davis, trompettiste (1926-1991). En 1948, il recrute des musiciens (Gerry Mulligan, John Lewis, Lee Konitz, mais aussi Gil Evans). Tous participeront à l'élaboration de "Birth of the Cool", Gil Evans étant l'arrangeur. Cet album va rester l'emblème du mouvement Cool, mis à part les enregistrements du quartet et du tentet de Mulligan.

En marge de cette école, il faut citer le pianiste Lennie Tristano qui, avec Lee Konitz et Warne Marsh va définir une esthétique Cool plus ascétique, qui se concentrera encore plus sur les lignes mélodiques des morceaux.

Mais le Cool Jazz c'est aussi le célèbre quintet de dave Brubeck et Paul Desmond.

Les représentants du Cool Jazz les plus connus sont donc: Miles Davis, Chet Baker, Gerry Mulligan, Lennie Tristano, Lee Konitz, Dave Brubeck et Stan Getz.


Le CoolJazz est souvent associé au mouvement "West Coast Jazz" joué en californie par des musiciens blancs travaillant dans les studios hollywoodiens. Parmi eux, Shorty Rogers, Chet Baker (trompettistes), et Shelty Mann (batteur).
En 1951, l'album de Rogers, "Modern Sounds" et les enregistrements de Gerry Mulligan avec son quartet sans piano avec Chet baker (1952) sont les plus représentatifs du genre.

Leurs influences: le Be Bop pour sa virtuosité et ses innovations), Lester Young (et son jeu détendu, Lennie Tristano (son expérience pré-free), le Swing de Count Basie, et les compositeurs du XXe siècle tels que Ravel et Debussy.
Ils savent lire les partitions et ont une solide formation musicale (contrepoint, harmonie, musicalité de l'interprétation). Les arrangements sont écrits et soignés, la musique écrite et l'improvisation sont intimement liées. D'autre part les formations incluent des instruments de l'orchestre symphonique tels que le Cor, le Tuba, ou le Hautbois. C'est un peu une fusion du jazz et du Classique.

L'album "Birth of the Cool" , en deux sessions fut enregistré en 1949 et 1950. La formation: un nonette (9 musiciens, dont Miles davis, Gerry Mulligan, Bill Barber, John Lewis, Lee Konitz et Kenny Clarke). Les arrangements sont de Gil Evans. L'album fut un échec commercial, bien qu'il ait inspiré des générations de musiciens par la suite, y compris le style "acidjazz" des groupes comme Portishead ou Massive Attack, mais aussi Björk ou Jamiroquai.
Cet album marque un tournant essentiel dans l'histoire du Jazz. Miles davis, lors de son voyage en Europe à Paris a découvert l'existentialisme, il en résulte une méfiance et une remise en question de l'expression jusque là plutôt extravertie des sentiments. Miles davis va rechercher un nouveau son. Il voudrait réconcilier le raffinement du Big Band et la tranparence des petites formations. L'orchestration sera donc légère (trombone, tuba, cors, saxophones). Cela donnera naissance à une musique calme, cristalline mais non privée d'énergie, simplement elle est plus abstraite, plus intellectuelle, plus "froide". Les solos mettent en valeur le son global de la formation plutôt que l'interprète soliste. La notion de temps (carrures, tempo) aussi est changée. Cela se voit particulièrement sur 2 compositions: "Jeru" et "Godchild". La carrure habituelle de 4 temps du jazz disparaît, le nombre impair de temps ou de mesures introduit une asymétrie dans la forme, il y a donc une fusion de l'arrangement et de l'improvisation, comme je l'ai dit. Jusque là on n'avait pas trop touché au cadre des morceaux, sauf peut-être Ellington qui associait ses standards à de grandes formes classiques comme le concerto, la symphonie, etc).

"Jeru" - Birth of the Cool


Lennie tristano berlin 1965

15 commentaires:

Anonyme a dit…

Super bloc-notes ... et en musique SVP !

madame musique a dit…

Merci!!!

Anonyme a dit…

Un bel article, aussi documenté qu'intelligent, je trouve.
Oui,c'est bien de rappeler combien on est à un tournant qui sous ses airs sages alimentera des remises en causes prolifiques. Parce que derrière le "retour au calme" après la frénésie Bop, il y a aussi la maturation, la recherche, la réflexion... Une nouvelle séquence historique est entamée, sûrement.
Le jazz étant une musique où la croisée des chemins est norme, c'est toujours un peu difficile de savoir qui initie quoi, toujours plus compliqué que ça en a l'ai ; mais vraiment à partir des années 50, on sent se dessiner une sorte d'introspection, une volonté d'exploration que des Mingus, Coltrane et autres Sun Ra ou Coleman vont rendre palpable. Déjà Tristano... Recherche des racines africaines aussi, les rythmes impairs, la transe orchestrale, l'improvisation de plus en plus libre et/ou mystique, l'expressivité viscérale qui prend le pas sur la virtuosité des duels entre boppers...
Y'a un tournant. Et c'est amusant d'imaginer la tempête sous l'apparente légereté du Cool !

Au fait, pitite coquillette, faut rendre son "G" à notre barrytoniste : le grand Gerry
:-)

madame musique a dit…

je vais corriger çà, grand merci pour le compliment.
ce qui m'intéresse c'est l'interprétation, la façon déliée de jouer. je suis revenue à cette musique en passant par le trip hop, c'est drôle.
Je pense que chaque mouvement appelle un contre-mouvement. c'est ce qui rend passionant le fait de vivre à notre époque. quel bilan!
C'était un plaisir, à bientôt!

Lucie a dit…

Merci pour la découverte de Lennie Tristano... j'aime bien son style, minimaliste mais assumé!

Anonyme a dit…

un coucou vite fait mais avec le coeur , saleté de grippe très forte , je me relève tout doucement après 3 jours de couette et sous laquelle je vais retourner . très douce journée , gros gros bisous . yepa

madame musique a dit…

coucou lucie, moi aussi, une belle découverte pour ma part. ça te donne pas envie de jouer un peu de jazz?

Soigne-toi bien, Yepa (moi je fais le vaccin homéopathique, et toi?
Merci d'êtres passées, toutes les deux...

Anonyme a dit…

Mmm le jazz cela me rappelle Bruxelles et mon père. J'avoue que j'ai un faible pour Chet Baker.

madame musique a dit…

ah oui, chet baker, le james dean du jazz. charmant et tellement "sensitive"!!
bonne journée à toi, Caro.

Anonyme a dit…

C'est un faible tout musical. ;-)

Anonyme a dit…

coucou ma belle , je vais mieux et passe te remercier de tout mon coeur , gros gros bisous , passe un très doux dimanche , yepa

Anonyme a dit…

Je suis d'accord avec mon ami Alex pour la qualité de cet article. Cependant, encore une fois, rien sur Stanislas Morton, lui qui a pourtant accompagné tous ces mouvements.

http://www.intuite.net/scriptum/2006/08/22/55-stanislas-morton

Claudio Pinto a dit…

Merci pour ce très bel article, Madame Musique. Je suis particulièrement sensible à ce courant très important du jazz, le Cool Jazz. Comment pourrait-on se passer d'un Stan Getz ou d'un Chet Baker? Je suis sûr que Chet Baker et Miles Davis auraient à eux seuls fait aimer la trompette à Mozart.

Anonyme a dit…

Merci cher Claudio de ta visite. Cet article n'est que le premier des trois. Il y a des videos fabuleuses de ses titres les plus connus dans l'article qui retrace sa carrière. Je me suis régalée.
Je suis en vacances. Je viendrai te faire un coucou dans ton espace dès que rentrée. Bises

Claudio Pinto a dit…

Tidoigts, Au plaisir de te voir danser et voguer un brin dans mon espace ! xxx